De 1896 à 1913

Volldampf unter Palmen. Erinnerungen eines Ingenieurs.

HENTZE (Willy) ↗ ca 1903 ↘ 1905

Édition

Éditeur : Heffe & Becker

Lieu : Leipzig

Année : 1928

Langue : allemand

Description

État du document : bon

Références

Réf. Biblethiophile : 004505

Réf. Pankhurst Partie : manque

Réf. UGS : 0190300

Première entrée : 1903

Sortie définitive : 1905

COLLATION :

250 S., Oln., Abb., Einband angeschmutzt, Schnitt fleckig, Papier gebräunt.

En savoir plus

Willy Hentze n’aura pas passé à la postérité grâce à l’Encyclopaedia Aethiopica ni grâce à la bibliographie des Pankhurst[1], ce qui est plus surprenant. Bairu Tafla orthographie correctement le nom de l’ingénieur allemand dans son Ethiopia and Germany publié en 1981 et le dénomme Willi Henze, treize ans plus tard, dans son Ethiopia and Austria , peut-être en raison de la source à laquelle il se réfère.

Deux ouvrages de Hentze nous aident à retracer son parcours dans la Corne de l’Afrique. Le premier est intitulé Am Hofe des Kaisers Menelik von Abessynien[2]. L’introduction y est datée de fin juillet 1905, à Vienne. En 1928 sort le deuxième livre sous le titre Volldampf unter Palmen[3].

La présentation de l’Éthiopie est faite dans l’édition de 1905, de manière relativement détaillée. Tout autant détaillées sont l’énumération et la description de ses exploits techniques. Ménélik est un passionné de technique ; il veut tout comprendre, tout apprendre et expérimenter. Le plus souvent, c’est le remontage d’une mécanique qui pose le plus de problèmes au negusä nägäst. Son ingénieur se voit relever le défi de réparer l’objet. L’édition de 1928 est composée d’une série d’anecdotes, décousues et pas forcément chronologiques, qui concernent, en grande partie, les prouesses techniques d’un homme techniquement doué.

Pour Hentz, l’aventure a dû débuté en 1902 quand Ménélik mandate un homme d’affaire de Dire-Dawa, un certain Hagop Baghdassarian (1873-1932)[4], de créer la Monnaie d’Addis-Abéba dans le but de s’affranchir de celle de Paris. La commande d’une presse et des accessoires est passée auprès d’une entreprise viennoise, Arthur Krupp[5]. Sa fabrication est confiée à l’entreprise Vulkan et son montage à un de ses ingénieur, l’Allemand Willy Hentz.

Bon an, mal an, la presse et des accompagnants parviennent par caravane à Addis-Abéba en juillet 1903. Willy Hentz, âgé entre 20 et 30 ans, accompagné son épouse, une jeune autrichienne, voit dans ce mandat une chance de faire carrière à l’étranger. Pendant les vingt mois que dure son séjour et grâce à ses compétences, il deviendra l’ingénieur de l’empereur en frappant les pièces à son effigie ; en réparant le rouleau compresseur à vapeur de 30 tonnes que l’Arménien Serkis a fait venir de Dire-Dawa par 3000 soldats mais qui reste incapable de le réparer et le mettre en service ; en réparant une dynamo ; en créant une turbine hydraulique ; en éclairant, au moyen de batteries, la tente du souverain en campagne ; en mettant en service une scie à ruban et une raboteuse, actionnées par un éléphant ; en lançant un pont métallique sur l’Awash, etc.

Pour biblethiophile, l’anecdote du pont sur l’Awash[6] a une résonnance toute particulière. En 1903 (sic), 480 chameaux transportent des modules métalliques sur la rive droite de la rivière. À l’endroit choisi, les deux berges rocheuses ne sont distantes que de 11 mètres, le précipice sensiblement plus profond. Sous les yeux ahuris des habitants, l’ingénieur conduit l’assemblage des modules à l’image du pont fixe 69 de l’armée suisse. Son montage se base sur le principe d’une balance à poids, idéalement toujours horizontale, statique. Les modules sont successivement assemblés, symétriquement à un appui. En phase finale, la structure mesure 22 mètres et peut théoriquement rester en équilibre sur son appui. Il est aisé de lire dans la pensée des habitants, prostrés devant un pont d’une portée 22 mètres pour franchir 11 mètres et de surcroît construit parallèlement au courant, ce qui n’est pas tout à fait le but d’un pont. La surprise est totale lorsque Hentz donne l’ordre d’actionner les treuils qui pivote la structure sur son point appui et qui termine en beauté le travail. La réaction est immédiate, les spectateurs des deux rives se ruent sur le pont large de 2 mètres, sans garde au corps. Au milieu, aucune solution n’est trouvée et l’attroupement devient dangereux. L’ingénieur se résigne à tirer trois coups de feu en l’air pour tétaniser la foule. Malheureusement pour certains, l’effet escompté est inverse, les aventureux prenant ces coups de semonce pour un encouragement à être les premiers à avoir franchi l’Awash sans se mouiller les pieds. On ne retrouvera pas tous les corps des infortunés.

Sa volonté de plaire à tout prix à Ménélik et de se rendre indispensable au fonctionnement de la Monnaie l’amène à entre en conflit avec les Arméniens. En février 1905, ses adversaires réussissent à le faire expulser d’Éthiopie. Si l’on en croit le professeur de numismatique à l’Université de Vienne, Wolgang Hahn, c’est Alfred Ilg qui demande de l’aide du gouvernement autrichien qui profite d’une ambassade austro-hongroise auprès de Ménélik pour répondre favorablement au conseiller de Ménélik.

Mais que les envoyés autrichiens ne parviennent à Addis-Abéba, c’est la mission allemande de Friedrich Rosen[7] auprès de l’empereur Ménélik qui croise Willy Hentze et sa femme sur le chemin du retour en Europe. Nous sommes le 5 février 1905. Arrivé peu après dans la capitale, Felix Rosen, le frère de Friedrich, affirme que la presse ne fonctionne pas. De Coppet, dans les notes qu’il rédige pour la Chronique du règne de Menelik II de Guébré Sellassié[8], nous apprend que la puissance des presses de la Monnaie d’Addis-Abéba s’est avérée insuffisante pour frapper des thalers et que la frappe fut suspendue et restituée à la Monnaie de Paris.

Le 16 mars 1905, alors que la mission allemande s’évertue à mettre en fonction une dynamo qu’elle veut offrir au negusä nägäst, c’est l’arrivée de l’ingénieur de l’ambassade austro-hongroise menée par Ludwig Ritter von Höhnel[9], un certain Jenner ou Franz Jinna, qui sauve son honneur. Bairu Tefla (BAIRU TEFLA, 1994) a déniché dans les archives nationales autrichiennes une lettre d’Ilg qui nous apprend que Franz Jina, le Jenner de Rosen, a passé trois mois à Addis-Abéba à réparer la Monnaie, le rouleau compresseur, la dynamo, un moulin, etc.

A la lecture des deux ouvrages de l’ingénieur allemand, l’absence d’Alferd Ilg est notoire. La lettre de Ilg semble confirmer que l’entente n’était pas cordiale entre les deux ingénieurs, tous deux constructeurs de ponts. Hentz quitte en 1905 alors que l’influence de Ilg décline et aboutit à sa démission deux ans plus tard.

Dans l’édition de 1928, Hentz affirme posséder un appareil de photo et savoir s’en servir. Les deux ouvrages contiennent des photos inédites que l’on pourraient lui attribuer si l’auteur ne remerciait pas Bertolani de lui avoir concédé quelques clichés. L’absence d’une photo du pont terminé est pour le moins inattendue.

Willy Hentz et sa femme, on l’a dit, ont quitté l’Ethiopie en 1905. La fin de Volldampf unter Palmen nous apprend que le couple a été engagé par le Sirdar pour la construction du train qui reliera Berber à Port-Soudan.

Biblethiophile, le 24.06.2024.


[1] PANKHURST (Rita & Richard), A select annotated bibliography of travel books on Ethiopia, in Africana Journal, 1978.

[2] https://www.biblethiophile.com/document/am-hofe-des-kaisers-menelik-von-abessynien/

[3] https://www.biblethiophile.com/document/volldampf-unter-palmen-erinnerungen-eines-ingenieurs/

[4] Le dernier travail en date qui sera privilégier est celui de : Wolfgang Hahn, How Menelik came to have a mint, in Ficquet, Éloi, et al., éditeurs. Movements in Ethiopia, Ethiopia in Movement. Volume 1. Centre français des études éthiopiennes, en ligne https://books.openedition.org/cfee/1173 consulté le 24.06.2024. BAIRU TAFLA (1994) parle-lui d’un Arménien dénommé Khajadurian.

[5] Op. cit. et Rosen (1904)

[6] p. 121-138.

[7] https://www.biblethiophile.com/document/eine-deutsche-gesandtschaft-in-abessinien/

[8] https://www.biblethiophile.com/document/chronique-du-regne-de-menelik-ii-roi-de-rois-dethiopie/, p. 508-509.

[9] https://www.biblethiophile.com/document/mein-leben-zur-see-auf-forschungsreisen-und-bei-hofe-erinnerungen-eines-osterreichischen-seeoffiziers-1857-1909/